Penda Sarr : interview de Samba Sarr - 12/04/2020
« Bonjour, je m’appelle Samba Sarr, je suis un petit-fils de Moussa Boukari Sarr, fondateur du village de Ngaolé vers 1765. Et ce village mythique et mystique, un village de pêcheurs, situé à 3 km de Podor, est le village de mes ancêtres, dont mon papa qui s’appelle Hamedine Sarr, a été chef de ce village.
Cette histoire riche en culture est connue partout dans le monde et particulièrement au Sénégal. Donc, en tant que petit-fils, je suis né à Saint-Louis où j’ai grandi et qui est la capitale de la région du fleuve.
J’entendais beaucoup mes parents parler de leur village, de son histoire qui est vraiment riche en histoires et passionnante, ceci je l’entendais depuis tout petit et je rêvais de découvrir cette histoire de mes ancêtres et le village de Ngaolé.
En 2000, j’avais fait un tableau que j’ai appelé « l’esprit Soubalbé » parce que cette histoire de Penda Sarr et Moussa Boukari, de qui elle a reçu un apprentissage, me passionnait et j’ai voulu retracer cette histoire mais je n’avais pas les pistes nécessaires pour la faire connaître à la jeunesse sénégalaise.
Donc quand mon père a été nommé à son tour le chef de village de Ngaolé, je l’ai accompagné pour faire la découverte de cette riche histoire et c’est à ce moment que j’ai découvert ce village et que tout ce qu’on en disait était vraiment réel. Du coup, j’ai pensé à retracer cette histoire et la partager avec la jeunesse sénégalaise.
L’histoire de Penda Sarr est vraiment répandue partout en Afrique et il se trouve qu’il y avait des éléments témoins dans ce village, comme le Kamil de Moussa Boukary, qu’il avait écrit car c’est un érudit de l’Islam et qui est vraiment mon arrière-arrière grand-père.
Depuis cette culture posée par ce vaillant personnage qui est Moussa Boukary, on l’a suivi et on nous a légué cette histoire, ce potentiel, cette connaissance qui est vraiment la culture des Soubalbés.
Et c’est au moment où je suis parti avec mon papa, en 2017, que j’ai découvert Ngaolé aussi avec son potentiel d’histoires, avec tous les gens culturels qui sont là-bas. Et cette construction culturelle, les maisons construites en banco, fabriquées par eux-mêmes, leurs pirogues, leurs filets et tout leur matériel de maison, tout est construit par eux. Ce sont donc de vrais artisans et c’est de l’histoire que tu vois dans ce village.
J’ai donc voulu tracer cette histoire et pour l’élargir en tant qu’artiste-plasticien, on avait au départ que des textes oraux et écrits et du coup j’ai pensé à mettre en œuvre des images, comme le portait de Penda Sarr, la description de Penda Sarr, son image et en même temps le parcours qu’elle a fait à partir de Ngaolé, jusqu’à Saint-Louis, jusqu’au Mali, jusqu’en Mauritanie !
Parce que aujourd’hui Ngaolé c’est aussi un voisinage entre deux pays, le Sénégal et la Mauritanie. Ce personnage que j’ai peint, en faisant une recherche avec des parents de Ngaolé - et aussi parce que j’ai les traits de mes ancêtres qui sont là-bas - et c’est à partir de là que j’ai pu imaginer le portait de Penda Sarr. Parce que c’est comme ça qu’on pourra aussi enseigner à la jeunesse sénégalaise cette culture et qui est Penda Sarr parce que l’image parle.
Depuis 2017, j’ai fait une série de tableaux d’histoires sur Penda Sarr que j’ai réussi à faire avec l’accord du chef de village, qui sont mes frères et qui sont aujourd’hui à Ngaolé et l’accord de la jeunesse qui est là-bas, qui vraiment ont appuyé pour mettre en place une maison témoin. Une maison témoin d’histoires riche en couleurs a été mise en place.
Donc après tout ça, j’avais envie d’élargir cette histoire avec des images et des textes en faisant une exposition itinérante.
J’ai rencontré Isabelle Visart, qui est à Saint-Louis depuis 2017 et notre rencontre a boosté ce rêve que je voulais mettre en place.
Avec son appui, j’ai pu reproduire les images qui sont en place à Ngaolé, que vous pouvez aller visiter, ces images sont reproduites sur des supports pour que je puisse faire un parcours au niveau du Sénégal pour apprendre et pour montrer à la jeunesse qu’il y a de l’histoire riche et réelle, qui est dans notre pays, à Ngaolé à 3 km de Podor.
Donc cette année 2020, j’ai débuté une exposition itinérante que j’ai commencé à Podor. Pourquoi à Podor ? Parce que Podor ou Ngaolé c’est la même chose, la famille se trouve tant à Podor qu’à Ngaolé et il s’est trouvé que pour une exposition il faut vraiment une galerie ou une bonne salle pour pouvoir installer les reproductions.
Donc, je l’ai débuté à Podor cette année 2020, le 15 février, on a exposé mais Ngaolé a répondu présent, ils se sont retrouvés dans cette expo et des images ont circulé sur Facebook et partout. Donc on a commencé le parcours à Podor, ensuite à Fanaye, village natal de Penda Sarr, parce que sa mère vient de là-bas (et donc Ngaolé et Fanaye se partagent Penda Sarr au bout des racines).
On est allé exposer à Fanaye et le maire a vu cette importance de réveiller cette culture, de rappeler aux gens notre culture riche en couleurs et il a décidé que chaque année le 22 février (date de l’expo) serait la « journée de Penda Sarr ». Et ça, c’est super ! et c’est ça que je voulais vraiment instaurer partout au Sénégal ! Il n’y a pas que Penda Sarr qui a marqué l’histoire du Sénégal, il y en a tant d’autres et on parle d’eux et pourquoi pas de Penda Sarr, la fille des eaux ?